Il est le baromètre de mon moral, lorsqu'il va bien, je vais bien, le simple fait de le retrouver, de passer la main dans ses crins, de suivre la courbe de son flanc, sentir sa respiration lente et calme, me serrer contre son encolure, sentir son odeur forte et douce suffit à mon bonheur. Sa présence est indispensable à ma vie.
J'ai attrapé une maladie vieille comme l'humanité et contre laquelle il n'existe, à ce jour, aucun remède. Ceux qui ont été épargnés en sourient, parfois s'en goussent. Ils ont tort. Elle paraît en effet anodine, négligeable, divertissante, elle est insidieuse, exigeante avant de devenir tyranique. Elle ne laisse aucun répit. Elle n'admet aucun rival. Elle exige qu'on lui sacrifie beaucoup de temps, une dispendieuse énergie, toutes ses économies, son corps et, qui sait, son âme. A l'instar de certaines religions, elle promet le paradis après qu'on ait bien souffert et qu'on s'est bien effacé. Elle déteste les paresseux et les lâches. Elle est effrayante et magnifique. Il arrive qu'on en meure. ...C'est la "fièvre du cheval".
JERÔME GARCIN